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Hiérarchies savantes et inégalités de genre dans le financement des sciences sociales au Québec

Description

Une question étonnamment négligée dans la recherche sur les inégalités de genre dans le domaine scientifique concerne la formation des hiérarchies savantes. Une abondante littérature documente les conditions structurelles, organisationnelles et culturelles qui orientent différemment les carrières universitaires des femmes et des hommes. En revanche, nous ne savons pas dans quelle mesure ces processus de stratification sont liés à la formation de hiérarchies symboliques qui attribuent de la valeur et du prestige à certains sujets et méthodes de recherche tout en en marginalisant d'autres. Cette lacune a de quoi surprendre dans la mesure où de nombreuses recherches empiriques ont documenté les variations liées au genre dans les spécialisations thématiques au sein des disciplines des sciences sociales. Ces travaux identifient également des différences genrées dans les méthodologies de recherche et les styles épistémologiques, les femmes étant surreprésentées dans les domaines perçus comme qualitatifs et « interprétatifs » et sous-représentées dans les domaines perçus comme quantitatifs et « positivistes ». À notre connaissance, ce projet serait la première tentative d'analyser la façon dont les hiérarchies savantes au sein des sciences sociales peuvent façonner différemment les opportunités de financement des chercheurs et chercheuses en sciences sociales au Québec. Pour ce faire, nous mobilisons des données inédites qui nous ont été communiquées dans le cadre d'une entente avec le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Ces données, qui couvrent la période 2000-2021, présentent l'intérêt d'inclure les projets non-financés, ce qui permet de tester l'hypothèse selon laquelle la valorisation de certains types de recherche par les membres des comités d'évaluation peut contribuer à reproduire les disparités de genre dans l'attribution de financements en sciences sociales. Les éléments suivants, qui figurent dans les demandes de subvention ou de bourse, fourniront des éléments sur le contenu et l'orientation scientifique des projets : mots-clés, discipline(s), domaine(s) de recherche, période historique, régions géographiques, pays. En complément de ces informations, nous effectuerons une analyse lexicométrique à l'aide du logiciel Iramuteq afin de classer et d'analyser le contenu thématique de chaque résumé de projet. Suivant cette méthode, chaque projet sera placé dans un groupe thématique, ce qui permettra de comprendre comment se structure l'espace thématique des sciences sociales au Québec. Nous effectuerons également un codage manuel des résumés de projet afin d'identifier leur orientation méthodologique (qualitative, quantitative, mixte). Ces données feront l'objet d'analyses quantitatives de type régression afin d'évaluer l'effet de l'orientation scientifique (discipline, sujet de recherche, méthode, etc.) sur l'association entre le genre du candidat et l'obtention du financement. Dans un second temps, nous effectuerons une trentaine d'entrevues semi-directives avec les membres des comités d'évaluation du CRSH des trois disciplines suivantes : sciences économiques (7A), sciences politiques et administration publique (11A), sociologie, démographie et domaines connexes (8A). Ces données qualitatives fourniront des éléments empiriques sur la façon dont les projets sont évalués, ce qui permettra d'éclairer et de mieux interpréter les résultats quantitatifs obtenus lors des étapes précédentes.

Financement

Établissement nouveaux professeurs-chercheurs

FRQSC

2023-04 - 2027-04

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